où est passé mon sourire et ma joie de ces derniers jours? Je me lève, mon esprit est noir, je n'arrive plus à sourire. Mon poignet me fait terriblement mal, pourtant je ne pense qu'à une chose : récupérer mon ciseau ou piquer un couteau et recommencer. Où sont mes bonnes résolutions? Mes buts? Mes projets? Ils n'existent plus dans ma tête. Seule la déprime et la souffrance intérieur prennent toute la place dans ma tête. Je pensais aller beaucoup mieux, pouvoir sortir d'ici avec une nouvelle vie. Mais non, en fait, je suis bel et bien malade. Bien sure ma boulimie mais surtout cette dépression qui me laisse prisonnière de mon propre corps. J'ai surement tout pour être heureuse pourtant mon cerveau est parasité par des idées noires, par du mal-être et j'ai beau essayer de toutes mes forces de penser à du positif, mes amis, ma chienne, mes projets... rien n'y fait. Ces idées positives sont bloquées et ne peuvent sortir. Je veux parler de ma scarification au médecin mais ce n'est pas possible, il ne me laissera pas sortir. Je veux promettre que je ne referais as de bêtises mais je ne contrôle rien et si je vais pas bien je vais voler un couteau là-bas. Je peux donner ma parole de e plus me faire du ma d'aller mieux, de garder le moral, mais en fait je ne contrôle rien, je ne peux jamais savoir. Il suffit d'une seconde de crise et tout bascule. Que serais-je devenue si j'étais restée chez moi. Je ne serais certainement plus rien. Dois-je sortir et enfin en finir? Ou rester ici pour être protégée? Qu'y a-t-il de mieux pour moi? Mourir ou continuer à vivre cette horreur quotidienne?
Je vais revenir sur ma boulimie plus en détail: manger jusqu'à en perdre la raison et toujours recommencer, c'est ça mon quotidien à l'extérieur. Je n'ai jamais vraiment faim, juste le besoin de manger. Je ne peux pas contrôler ces pulsions avec de l'allégé ou des légumes, non, il me faut des sucres, des graisses, du consistant, du contenant. Et c'est un drame de ne pouvoir normalement me nourrir quand je ne pense qu'à maigrir tandis que mon cerveau a été programmé sur « gros ». rien ne m'intéresse plus si ce n'est mon poids. Dès que je me sens rejetée je me dis que c'est mon apparence physique qui est rejetée et je me dis que ma vie changerait si j'étais mince. Je préfère m'intéresser à mon corps plutôt que de consentir à être aimée. Je suis souvent convaincue qu'être mince sera la solution à mon problème. Je sais que la boulimie est une façon de me maltraiter parce que je suis persuadée de ne pas mériter mieux. Derrière le désir d'être mince est-ce en fait le désir d'être amoureuse? La fin de la solitude? Ce comportement obsessionnel est la manifestation de mon désespoir. Lorsque je suis en crise, que cela soit de boulimie ou des idées suicidaires, j'ai la sensation physique que le monde va s'écrouler, qu'il n'y a rien à faire. Il suffit d'un simple incident pour que tout autour de moi s'effondre en poussière. Je sais qu'au fond de moi j'ai peur qu'on m'abandonne. Que ça soit mon ex qui part travailler, mes amis que je vois moins, j'ai l'impression que s'ils me quittent je ne serais plus rien. Mon comportement obsessionnel est une forme de désespoir fondée sur le sentiment que personne ne m'attends chez moi. Je n'ai jamais rien désiré que l'amour. Je n'ai jamais désirer devenir obsédée. Je le suis devenue par instinct de survie, pour éviter la folie. Ayant l'impression de ne jamais vraiment avoir été aimée, je ne sais pas ce qu'est d'être amoureuse, et ça c'est bien vrai. Pendant mes 7 ans avec Gaby, cette question m'a obsédé, « suis-je amoureuse? Qu'est-ce que l'amour?... » ce comportement obsessionnel est la manifestation de mon incapacité à m'aimer. Tout est là, tout est dit! Chaule jour je me dis que quelque chose ne tourne pas rond chez moi et donc je ne suis pas digne d'être aimée. Étant gamine, j'ai caché de la nourriture dans ma chambre, volé un peu d'argent à ma mère pour acheter des sucreries? Je n'en suis pas fière mais c'était plus fort que moi. Lorsque mes parents partaient en week-end , en me laissant seule face à ma solitude, je mangeais en 1 fois tout ce qu'ils m'avaient prévus pour le week-end. Amour et obsession ne peuvent coexister. L'obsession c'est me dissimuler derrière la nourriture afin de me protéger de mon environnement. C'est m'isoler, n'avoir que peu d'estime pour moi. L'obsession me diminue et ne laisse aucune place à l'amour. Lors de mes crises de boulimie ou mes idées suicidaires je me sens comme possédée. Lors de ces crises, je ne fais plus attention à personne. Si dans ces moments là quelqu'un s'interposait entre moi et la nourriture je crois que je pourrais l'abattre. C'est pour cela que je ne veux pas demander à mes amis de me retenir de manger lorsqu'ils voient que je pars en crise. Après nos crises je me rends compte que je me suis totalement désintéressée de tout ce qui n'était pas nourriture. C'est ça qui est si déstabilisant, la boulimie semble avoir son propre esprit, sa propre voix et sa propre volonté, comme les idées suicidaires. Pour moi la boulimie c'est une perte de contrôle de la situation, de la terreur, de la frustration, du désespoir. Parfois cela me soulage de me dire que la nourriture est une drogue et que donc je ne peux rien y faire. J'ai un tel besoin d'être reconnue, appréciée, considérée par mes parents, juste exister. Je combats mes troubles depuis plus de 10 ans pour simplement essayer de vivre normalement. Je n'en peux plus!! le fait parfois d'aller jusqu'à voler pour manger fait que j'ai si honte de moi. J'éprouve de la haine et de l'angoisse envers ce que je suis. Je ne sais pas pourquoi je n'arrive plus à me laisser aller. « Je ne suis plus – et ne serais jamais plu – un enfant et rien ni personne ne pourra plus me faire souffrir. » « fuir le passé sans jamais pouvoir profiter du présent ». il m'est souvent arrivée de vouloir me faire du mal, avoir un accident, une grave maladie en espérant que la perspective de ma mort réveillerait des ardeurs amoureuses et que confrontés à l'idée de ma perte, les gens comprennent à quel point ils m'aiment. Être prête à risquer ma vie juste pour me rendre compte que suis digne d'être aimée. Combien de fois y ai-je pensé depuis toutes ces années? Parfois je veux mourir plus que tout autre chose mais imaginant la peine que cela ferait à mes parents, à ma famille, à mes amis je me mets à pleurer en me disant « je ne veux pas mourir ». mais c'est encore vivre pour les autres. La boulimie me m'est dans un état de frénésie incontrôlable. Il me faut absolument trouver dans l'instant quelque chose à manger, cela devient pour moi une question de vie ou de mort, de trouver dans les 5 minutes, de la nourriture. C'est pareil pour mes idées de scarifications, je suis dans un état de frénésie incontrôlable. Il faut absolument que je trouve quelque chose pour me couper, me faire du mal. Soit je me déteste car je me trouve trop grosse soit je me goinfre à en éclater. J'ai des nausées, crises de foie... mais j'attends que ça passe et je repars manger. Manger ne me procure aucun plaisir, je n'ai pas de goût, c'est juste un moyen de m'infliger la souffrance que je crois mériter. J'aimerais pouvoir tout oublier, me débarrasser de moi-même, je ne peux plus me supporter. Je croyais dur comme fer que mes problèmes de relation à mon corps et à la nourriture étaient les seules causes de ma souffrances. De même que je me disais que si je devenais mince, tout serait pour le mieux dans le meilleur des mondes. Mais aujourd'hui avec l'envie de mourir, les scarifications... je me rends compte que ma boulimie est la seule chose qui me protège de cette souffrance. J'ai tellement cette certitude que si je ne trouve pas une raison d'être aimée – être malade, être malheureuse... - , si je ne crée pas quelques drames dans ma vie, personne ne s'intéressera à moi. Dans ma famille, nous évitions d'exprimer ouvertement nos sentiments. Tristesse, solitude,peur, colère, affection, respect, tendresse restent tus ou dissimulés. Ce n'est que dans les situations de crise que ma famille se met à réagir. C'est la mon seul moyen d'attirer leur attention. Je crois que si j'arrive à être mince ma vie s'en trouvera transformée. Mais j'en ai perdu des kilos à de nombreuses reprises pour les reprendre par la suite. J'ai passé des années à me convaincre que c'est parce que je ne suis pas digne d'être aimée. Je suis persuadée que le poids est la source de tous mes problèmes. Dans toutes les circonstances je crois dur comme fer que seul mon physique est en cause. Mais la minceur ne peut – et ne pourra jamais – guérir la souffrance et les angoisses de mon enfance. La minceur n'est qu'un moyen de tromper la douleur en me fournissant un but auquel je puisse rêver sans jamais risquer de l'atteindre. J'ai toujours le sentiment de vide, comme si la vie que je menais n'était pas la mienne. Je rêve qu'un jour, cet amour de mes parents que je n'ai pas reçu ou pas su recevoir, me soit enfin accordé et ma vie en sera transformée. Mais ce rêve devient plus fort que la réalité et fini par m'empêcher de VIVRE CHAQUE MOMENT PRESENT.
Après cette petite étude de ma boulimie sur laquelle je reviendrais plus tard, je vais tenter de parler de ma journée. Dure, dure, dure journée. Pas le moral. Je rencontre le médecin, lui avoue tout pour la scarification et il m'apprend que mercredi je ne pourrais pas aller au basket. Là tout s'écroule. C'était ma seule joie depuis des semaines, la seule chose qui allait me remonter le moral et me booster à vouloir continuer à me battre. Je sors de l'entretien anéantie, plus envie de vivre. Je ne peux pas m'arrêter de pleurer et répète à Rom que je vais mourir, que je ne vais pas tenir. Je me sens comme une malade en phase terminale. Mon corps et ma tête sont déjà morts. Je sais que je vais mourir. Un coup de fil pour le stage au Sénégal me change un peu les idées. Je veux y aller. Pour moi aller là-bas est mieux que tous les hôpitaux ou médicaments. Mais le prix me fait vite déchanter: plus de 1200 euros, c'est pas grave je vais faire un prêt , j'ai besoin de cette rupture. Le médecin me demande ce qui me fait envie à l'extérieur : boire un verre, se faire un resto, un cinoche, un DVD... mais il me dit que tout ça c'est avec du monde. Il veut que j'apprenne à aimer faire des choses seule chez moi. C'est vrai, je ne supporte pas la solitude, toujours ce sentiment d'abandon, d'être seule face à mes angoisses. Mais en même temps, n'est-ce pas normal qu'une personne de 24 ans, célibataire, veuille pas rester chez elle et faire des choses avec ses potes? C'est vrai que moi c'est pousser à l'extrême car la moindre journée de libre, ou le moindre week-end où je ne vois personne est ultra angoissant. Dans ma tête tout est brouillé. Je ne me suis jamais fait autant de mal et n'ai jamais eu autant d'envie de mourir que depuis que je suis ici. Enfermée entre 4 murs je deviens folle. Alors c'est quoi? Ma dépression qui ressort car je ne peux plus manger pour m'apaiser et que je me retrouve seule avec moi-même qui fait que je veux tant me faire du mal? Ou est-ce dû à cet endroit où il n'y a pas d'activité, où je n'évolue pas, où je ne m'épanouis pas? Jamais avant j'avais pensé à la scarification. Je veux mourir, mais pourquoi? Mal-être ou seule issue pour sortir d'ici? Je sens de plus en plus que ce n'est pas adapté ici pour moi. Je ne remets pas en cause l'hôpital, mais juste que moi ce qui y est proposé ne me convient pas. Peut-être l'aide qu'on nous apporte ici aux autres est bénéfique mais moi ça ne me soigne pas. On dit souvent qu'il faut essayer plusieurs thérapeute avant de trouver le bon, celui avec qui ça accroche. Je pense que c'est pareil pour les instituts. J'ai l'impression que ce lieu n'est pas adapté pour moi. Comment savoir si je me trompe? Le médecin dit que je dois pas aller à Paris, qu'avant de soigner ma boulimie je dois soigner ma dépression et mes idées suicidaires. Il a surement raison mais je ne veux pas rester là!! je veux essayer Paris. Et si ça ne marche pas je veux essayer un autre institut. Je veux tout essayer. Qu'est-ce que j'ai à perdre? J'ai appelé ma mère pour qu'elle appelle le Docteur de famille et 2 autres instituts à Paris. Je me revoie m'accrochant au manteau de Rom, en larme, lui suppliant de ne pas m'abandonner, de m'emmener avec lui. J'ai eu soudain si peur de moi, de ce que je pouvais me faire, si peur de mourir à Charles Perrens. Non, je ne dois pas. Je dois m'accrocher et essayer d'autres méthodes. Je n'en ai essayé qu'une pour le moment. C'était pas la bonne, c'est tout. J'ai des choses à faire sur cette terre. Si on m'a doté d'une hypersensibilité et d'intuitions ce n'est pas sans raison. Ce dont je n'ai pas parlé aussi c'est de la solidarité dont les patients font preuve entre eux. Lorsque je pleurais, ma voisine de chambre est venue me prendre dans ses bras, Marie qui est autiste est immédiatement venue me faire un câlin et toutes les filles sont venue me remonter le moral.
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